Quel titre provocateur pour un novice en éthologie ou en biologie évolutive ! Et pourtant quel grand sujet que celui-ci. Pour la critique d’un premier livre d’éthologie je n’ai pas été tendre avec vous sur le choix. Ce livre petit mais extrêmement condensé n’est pas de ceux que l’on lit pour se détendre. Et pour preuve il m’a fallu 3 ans pour le finir. Vous l’avez compris c’est un livre qui requiert des savoirs de base sur la sexualité animale pour pouvoir le digérer. L’auteur Thierry Lodé le fait bien comprendre, il ne s’embête pas à ménager son lecteur en enrichissant son texte de définitions et d’explications. Non, si vous vous plongez dans ce livre c’est pour vous perdre, nager à contre courant, batailler avec votre cerveau sur un des sujets les plus complexes de l’étude du comportement animal. Pourquoi ce livre alors ? Car c’est honnêtement un des livres les plus intéressants que j’ai eu à lire et un de ceux qui m’a fait le plus cogiter. Thierry Lodé transpire la passion pour ce sujet d’étude et ça se voit. A chaque page que je tournais je ne pouvais m’empêcher de me demander comment il a pu fournir un tel travail de réflexion et de recherche bibliographique (la bibliographie fait exactement 43 pages…). Ce livre fourmille de théories sur la sexualité des animaux, d’expériences, de travaux et d’exemples concrets sur des centaines d’espèces différentes. Tout est passé au peigne fin, des parades amoureuses à l’acte sexuel, de la recherche du partenaire à l’investissement reproducteur, du plus petit ver parasite au grand éléphant d’Afrique. Et puis, qu’est-ce que le viol, le plaisir, ou l’homosexualité chez les animaux ? Qu’est-ce qui fait qu’une espèce a tendance à être monogame ou polygame ? Qui sont les vrais boss de cette battle finalement, les mâles ou les femelles ? (C’est en fait une vraie question scientifique je vous assure). Et pour aller plus loin, quelle est la place de l’Homme dans tout ça ? Quelles sont les limites de la science à comprendre ce comportement complexe? Alors ce que je vous propose avec cette critique c’est de vous donner soit l’envie de lire le livre si vous êtes déjà un peu calé sur le sujet ou, si vous n’y connaissez rien, d’apprendre plein de choses en ménageant vos petits neurones. Avant de commencer, quelques définitions : Système d’appariement : Processus de formation des couples. Monogamie : le fait de n’avoir qu’un partenaire sexuel à un temps donné. Polygamie : le fait d’avoir plusieurs partenaires en même temps. Polygynie : le fait pour un mâle d’avoir plusieurs partenaires femelles en même temps. Polyandrie : le fait pour une femelle d’avoir plusieurs partenaires mâles en même temps. Harem : groupe d’animaux sur un territoire permanent composé d’un mâle dominant et de plusieurs femelles. Lek : espace où se réunissent plusieurs mâles pour effectuer leurs parades amoureuses et compétitrices devant les femelles. Phénotype : Traits ou caractères observables d’un individu. Phylogénie : étude des relations et liens entre espèces apparentées au cours de l’évolution. Spermathèque : poche remplie de sperme que les mâles de certaines espèces laissent aux femelles qui s’en serviront pour féconder leurs œufs. Petit point sur la sélection sexuelle Dans son livre L’Origine des espèces (1859), Darwin nous présentait son explication de la sélection naturelle. Qui explique, en gros, que les individus les plus adaptés à leur environnement sont ceux qui réussissent à survivre pour se reproduire et qui donc transmettent leurs gènes aux générations futures. C’est la lutte pour la survie. Mais Darwin se rend compte que cette sélection seule ne pouvait expliquer qu’il y ait autant de variations chez des individus d’une même espèce mais aussi que certains traits inutiles à la survie puissent perdurer dans le temps. Pourquoi certains mâles, comme les paons et leur magnifique queue par exemple, se trimballent cet accessoire hyper handicapant qui les rend plus vulnérables face aux prédateurs ? Tout simplement pour se reproduire. Darwin évoque alors ce deuxième concept de sélection sexuelle qu’il définit comme : « une lutte entre mâles pour la possession des femelles ; et le résultat en est non pas la mort du perdant, mais le fait qu'il aura aucun ou peu de descendants. » Pourquoi le terme de "guerre" ?Car en biologie évolutive l’accouplement est une recherche de pouvoir, le pouvoir du contrôle de la reproduction. Mâles et femelles bataillent pour leur propre succès reproducteur. Ce cliché, pas totalement faux, qui affirme que les mâles privilégient la quantité et les femelles la qualité, trouve sa logique et ses limites. Les mâles ne sont physiologiquement pas limités à un nombre de descendants. Plus un mâle féconde de femelles, plus il a de chances de transmettre ses gènes à la génération suivante. Plan à court terme, faisable le temps d’une vie. Par contre une femelle est limitée par sa propre capacité à enfanter. Sa stratégie consiste donc à choisir le ou les mâles les plus qualitatifs possibles pour transmettre les bons gènes qui feront que ses petits auront le meilleur succès reproducteur possible et qui transmettront à leur tour les gènes de leur mère à leurs petits. Plan à long terme, sur plusieurs générations. Cette compétition des sexes façonne l’évolution des mâles et des femelles de chaque espèce qui constamment inventent de nouvelles méthodes pour surpasser l’autre. Une sorte de course aux armements au sein d’une même espèce. Car si Darwin pensait que la sélection sexuelle n’était qu’une affaire de mâles, il avait bien tort. Pendant longtemps les femelles ont été considérées comme passives et non déterminantes lorsqu’il s’agissait de reproduction, mais plus les années passent et plus les études montrent la complexité de cette affaire. Il se pourrait même grandement que ce soit le sexe faible qui ait le plus souvent le dernier mot. En bref, la nature ne se laissera jamais résumer en deux phrases bien construites. Comment les animaux choisissent leur(s) partenaire(s) ? quelques théories : La théorie du handicap C’est sûrement aujourd’hui la théorie la plus connue et la plus acceptée en biologie évolutive. Elle explique pourquoi certains mâles sont affublés d’attributs hypertéliques, c'est-à-dire des caractéristiques physiques ou physio sensorielles exagérément grandes, surdéveloppées ou extrêmement colorées, qui des fois les handicapent dans leur vie de tous les jours. Amotz Zahavi en parle à juste titre comme des handicaps séducteurs. Revenons à nos mâles paons, un exemple très utilisé pour illustrer cette théorie. Leur queue ne peut s’expliquer du point de vue de la sélection naturelle car elle ne sert qu’à séduire, la preuve, elle tombe une fois la saison des amours terminée. Alors qu’est-ce qui attire autant les femelles dans cet accessoire coloré ? Selon la théorie du handicap les femelles choisiraient les mâles avec la plus grande et jolie queue car c’est justement la plus handicapante ! En fait ces mâles prouvent qu’ils arrivent à survivre même avec leur handicap, du coup plus leur handicap est grand plus leur aptitude à survivre est avérée. Néanmoins, chez de nombreuses espèces, ces attributs hypertéliques possèdent la deuxième fonction d’être une arme redoutable. Malheureusement pour nos paons c’est loin d’être le cas… « Nombre de mâles préfèrent sacrifier au dieu Mars l’intérêt de leurs attributs et exhibent des armements autrement dissuasifs. Que dire des impressionnants bois des cervidés ou encore des mandibules hypertrophiées des scarabées lucanes cerfs-volants ! L’anomalie réside bien plutôt dans le fait que certains attributs n’aient apparemment aucun autre rôle que séduire. Car enfin, l’exigence cruelle des femelles tend alors à transformer les mâles en véritables kamikazes. Pourquoi les livrées camouflées s’avéreraient-elles moins séduisantes ? L’existence d’une morphologie discrète affirme tout aussi bien l’aptitude à la survie. » La théorie des bons gènes Cette théorie rejoint celle du handicap car le fond reste le même : les femelles choisissent les mâles les plus beaux car ils sont plus aptes à survivre. La différence ici réside dans le pourquoi ils survivent. La théorie des bons gènes explique qu’un plumage aux couleurs éclatantes, un beau pelage ou d’immenses bois ou cornes, prouvent aux femelles que ces mâles sont en bonne santé, qu’ils ne sont pas malades mais surtout qu’ils ne doivent pas avoir de parasites car les parasites ont tendance à abimer ces parties du corps. Les attributs hypertéliques ne sont plus alors qu’un caprice des femelles car grâce à eux il est encore plus facile de différencier un mâle en bonne santé d’un mâle en mauvaise santé : « L’hypothèse de résistance aux parasites de Hamilton-Zuk est vraiment admirable, elle restaure l’importance des particularités hypertéliques dans la sélection sexuelle. Conférant un avantage génétique aux mâles qui en sont pourvus, les traits extravagants démontrent la qualité des mâles. » Cependant cette hypothèse se retrouve limitée par les études démontrant que les mâles ayant le plus grand taux de testostérone, donc étant les plus virils, donc ayant les attributs les plus développés, sont ceux qui ont le plus tendance à être infestés de parasites. Mais sinon, si les femelles choisissent toujours les mâles aux attributs les plus grands, les plus développés, les plus extravagants, pourquoi existe-il toujours des variations au sein des différents mâles d’une espèce ? En fait pourquoi existe-il toujours des mâles paons aux tailles de queues différentes si ce sont toujours les plus grandes qui sont choisies, pourquoi cette queue ne grandirait pas à l’infini au fil de l’évolution ? Thierry Lodé nous présente deux hypothèses qui tentent de l’expliquer :
La théorie de l’indicateur basé sur l’âge Selon plusieurs études les femelles préfèrent les mâles les plus âgés. La théorie de l’indicateur basé sur l’âge explique cette tendance par le fait qu’un mâle âgé prouve de par son âge qu’il a de bons gènes pour survivre tout simplement parce qu’il a vécu longtemps ! Et il est en plus aisé pour les femelles de choisir car chez de nombreuses espèces la particularité de la parade amoureuse évolue avec l’âge du mâle. Par exemple chez le crapaud accoucheur, plus un mâle est âgé plus sa gorge devient profonde et plus son chant devient grave. Les femelles discriminent alors au son le meilleur candidat. Un male âgé est en fait un mâle sûr, alors qu’un jeune mâle ne peut pas prouver encore combien de temps il va survivre. De plus les mâles âgés sont souvent les plus dominants. Mais comme toute théorie a ses limites : « La sélection de l’âge constitue un choix sexuel simple et efficace. Il faut cependant en nuancer l’intérêt. La fertilité des mâles peut parfaitement diminuer avec le temps et les femelles recherchant un doyen peuvent n’obtenir qu’un faible taux de fécondation. En outre, la charge parasitaire peut augmenter au fur et à mesure que se dégrade la résistance physique. L’objection majeure reste cependant que la sélection de l’âge ne constitue pas un avantage réel après un certain nombre de générations. » En fait chez les espèces qui vivent en groupes avec des mâles dominants ou en harem la majorité des jeunes sont issus du mâle le plus âgé, ils possèdent donc logiquement de bons gènes et en plus assurent une meilleure fertilité. La théorie de l’échelle Finalement est-il logique que seules les femelles choisissent le meilleur mâle et que les mâles n’aient pas leur mot à dire ? Pourtant chez bon nombre d’espèces c’est la femelle qui prodigue les soins aux petits et si elle le fait mal les petits mourront. Résultat : le mâle aura perdu du temps et de l’énergie pour séduire et féconder cette femelle alors qu’il aurait pu le faire avec une « meilleure » femelle. Selon la théorie de l’échelle deux méthodes s’offrent aux mâles comme aux femelles pour choisir leur partenaire :
Contrairement à ce que pensait Darwin la sélection sexuelle est bien plus complexe que la seule idée que « les mâles se battent pour les femelles ». En fait autant le mâle que la femelle n’ont pas intérêt à se tromper dans leur choix, d’où l’idée de conflit. « Dans tous les cas les mâles préfèrent les femelles apparemment les plus fécondes. C’est donc dire que les mâles peuvent s’avérer être le sexe sélectif. A contrario, les femelles peuvent devenir le sexe peu discriminant. Une seule éjaculation reste souvent très insuffisante pour assurer une fécondation. Les femelles ont donc intérêt à multiplier les copulations et à provoquer plusieurs rencontres. Finalement, chacun des partenaires doit investir assez pareillement dans l’effort sexuel. » C’est que très longtemps les chercheurs ont négligé le fait qu’il n’y a pas que les mâles qui se montrent mais que les femelles sont aussi très séduisantes. Les signaux indiquant la valeur des femelles a longtemps été réduit à un simple état affichant leur réceptivité. Il existe de nombreuses autres théories de la sorte mais il serait impossible de toutes les résumer ici. Monogame ou polygame ? Pourquoi certaines espèces sont-elles monogames ? Le sont-elles réellement ? Quelles sont les causes ? Quels bénéfices en tirent-elles ? Les espèces monogames doivent bien choisir leur partenaire car elles n’auront pas de seconde chance, mais d’un autre côté pourquoi fournir autant d’efforts pour n’avoir en récompense qu’une seule fécondation ? « La monogamie est fascinante parce qu’elle apparait vraiment comme une anomalie. Pourtant, selon la sélection sexuelle, enfin répartie également entre le mâle et la femelle, l’activité sexuelle devrait trouver dans le couple monogame un apaisement du conflit. » Le système d’appariement d’une espèce n’est apparemment pas une question de phylogenèse. En effet on retrouve la monogamie chez les mammifères, les reptiles, les oiseaux, les crustacés. Et même au sein d’une même classe, au sein d’une même branche il ne semble exister aucun lien phylogénétique logique expliquant pourquoi telle espèce préfère tel système d’appariement. « On pourrait supposer que la proximité physique qu’oblige la pénétration sexuelle encouragerait davantage la monogamie chez les espèces pratiquant le coït tandis que la fécondation externe provoquerait une augmentation des rivalités et une plus grande promiscuité sexuelle. Il n’en n’est rien. Des poissons à fécondation externe révèlent des mœurs très monogames alors que nombre de singes vivent une forte polygynie. En fait, très peu d’espèces organisent un appariement en couple monogame. Bien que la monogamie se manifeste dans des groupes zoologiques aussi différents que les crustacés ou les lézards, l’adoption d’un contrat d’exclusivité sexuelle n’est finalement majoritaire que chez les oiseaux. Encore que la tricherie en est rarement absente. » Alors qu’est ce qui incite à la monogamie ? La théorie du soin parental Cette théorie propose que les espèces monogames soient celles dont les soins aux petits nécessitent autant le mâle que la femelle. Mais aussi que pour pouvoir faire sa part des soins la femelle ait besoin du mâle et inversement. Cette théorie est soutenue par l’hypothèse du désavantage des femelles négligentes (décidément la biologie n’est pas tendre avec les femelles) qui explique que les femelles de certaines espèces n’arrivent pas à s’occuper seules de leurs petits et que si le petit monsieur veut des enfants il est obligé de mettre la main à la pâte. Tels les couples des manchots empereurs, obligés de se passer le relais entre couver et se nourrir pour éviter que leur œuf ne gèle. Vu que certains poissons à fécondation externe ont besoin d’être deux pour protéger leurs œufs des prédateurs cette théorie semble donc apporter une réponse à leur monogamie. Mais bien sûr il y a toujours quelques espèces qui ne veulent pas suivre les règles et adorent casser des théories basées sur des années de recherches. Car, comme la tortue verte, certaines espèces très fidèles ne s’occupent que très peu ou pas du tout de leurs petits. (Petite parenthèse) : Il faut noter que toutes les espèces ne sont pas monogames à vie. Certaines sont monogames saisonnières, c'est-à-dire que deux partenaires forment un couple stable lors d’une période de reproduction donnée, qui varie d’une espèce à l’autre, mais ça ne les empêche pas de changer de partenaire stable pour la saison suivante. Les stratégies de gardiennage Si certaines espèces n’ont pas de soins à apporter à leurs petits mais qu’elles sont quand même monogames c’est qu’elles doivent y trouver leur compte pour une autre raison. Chez de nombreux oiseaux monogames le mâle surveille fermement sa femelle. En fait l’explication c’est qu’en restant tout le temps avec elle il s’assure que tous les futurs oisillons de la portée seront les siens. Cette stratégie lui parait peut-être plus efficace que de féconder plusieurs femelles qui peuvent avoir été fécondées par d’autres mâles. En fait les femelles de certaines espèces peuvent choisir quel sperme servira à féconder leurs ovules. Selon l’espèce, soit parce qu’elles disposent d’une spermathèque, ou que peu importe combien de fois elle s’est accouplée ce sera le dernier mâle le père de ses petits, ou encore qu’elle puisse féconder ses ovules avec plusieurs spermes de mâles différents ce qui donnera une portée de demi-frères et demi-sœurs. Dans ces cas-là il est compréhensible que le mâle ait tout intérêt à rester auprès de la femelle pour s’assurer de sa paternité. La théorie de la fertilité cryptique Cette théorie est extrêmement intéressante et en plus elle est illustrée avec un exemple que j’ai trouvé très drôle et mignon. Les femelles crevettes grises ne peuvent se reproduire qu’au moment de leur mue. Le problème c’est que cette mue ne dure que quelques heures et son déclenchement est totalement inattendu. Le mâle est obligé de rester près de sa femelle tout simplement parce qu’il ne sait jamais quand il va pouvoir se reproduire ! Et ici la femelle tire totalement avantage de la situation car le mâle la protège farouchement et elle en a bien besoin quand elle se retrouve sans défenses privée de sa carapace. Certains chercheurs pensent que c’est aussi la raison qui motive les humains à être monogames. Aucun signe visible n’apparait lors de l’ovulation de la femme donc pour que l’homme puisse espérer avoir des enfants il doit rester auprès d’elle et répéter régulièrement l’acte sexuel (je vous apprends quelque chose ?). Mais il est bien difficile de rentrer l’Homme dans une case comme on veut le faire avec les autres espèces. Trop de facteurs, comme la culture, la religion, la situation économique et sociale, entrent en jeu pour pouvoir expliquer le système d’appariement humain. Si dans les pays occidentaux la monogamie est la règle (même s’il peut y avoir triche comme chez les oiseaux), allez demander aux Kuba-Lele ou aux Mosuo s’ils trouvent ça logique. Et le plaisir dans tout ça ?Ce qui est marrant et ce que j’ai toujours trouvé bizarre c’est que les biologistes sont persuadés que les animaux ont recours au sexe dans le but de se reproduire. Toutes les théories se regroupent autour de cette idée. Ils ne nient pas qu’ils ressentent du plaisir. Le plaisir est évident et des fois même très visible, sans plaisir les animaux continueraient-ils à s’accoupler ? Mais il n’est presque jamais mentionné que le plaisir pourrait être leur seule motivation. Ce plaisir est d’ailleurs très souvent dénigré. Car pour des chercheurs qui pensent dur et ferme que les animaux n’ont pas de théorie de l’esprit comment peuvent-ils imaginer qu’ils aient assez de conscience pour vouloir avoir une descendance ? Ce serait juste de l’instinct ? Une réponse hormonale incontrôlable ? Pourquoi alors les animaux développent des stratégies des fois très élaborées pour chercher et trouver le bon partenaire. Les sciences optent toujours pour l’explication la plus simple tant que ce n’est pas démontré. C’est une façon de penser qui certes, permet de ne pas s’égarer dans tous les sens, mais qui limitent toujours les chercheurs qui veulent aller plus loin. L’orgasme d’un point de vue évolutif est un bon moyen pour favoriser la reproduction car il incite les individus à répéter l’acte sexuel. Ainsi la probabilité d’avoir des petits augmente. Mais comment la sélection sexuelle explique l’orgasme lorsque celui-ci provient d’une masturbation, comportement très observé chez les primates, puisque apparemment il ne serait dans ce cas-là qu’une recherche pure de plaisir. Ou encore comment expliquer l’orgasme clitoridien vu que celui-ci ne conduit également pas à la reproduction ? Un moyen pour les femelles de tromper les mâles ? Si l’on regarde de plus près une espèce qui a recours au sexe de manière exagérée : les bonobos bien sûr. On voit que le sexe a très très souvent chez eux une fonction totalement différente de la reproduction. Les bonobos se servent du sexe pour vivre le plus en paix possible. Chez eux n’importe quelle excuse est bonne pour une copulation ou des caresses. « Le sexe chez les bonobos possède une fonction essentielle : il évite les bagarres. C’est ce que son brutal cousin le chimpanzé ne sait pas faire. Selon de Waal, il existe deux raisons majeures qui permettent de penser que l’activité sexuelles des bonobos sert d’abord à cimenter le groupe en résolvant les disputes. Tout d’abord, n’importe quelle occupation, qui intéresse plus d’un bonobo à la fois, conduit à un contact sexuel, y compris la recherche de nourriture. […] Deuxièmement, les bonobos pratiquent le sexe dans toutes les situations un tant soit peu agressives. Quand un mâle chasse un rival d’auprès une femelle, les deux concurrents s’abordent et optent pour des caresses de leurs parties génitales. Quand une femelle approche d’une rivale, les deux femelles se touchent et s’embrassent, adoptant vite des étreintes plus précises, vulve contre vulve. » Cet extrait me permet de rebondir sur un autre sujet délicat et plein de mystères : l’homosexualité. L’homosexualité chez les animaux D’un point de vue biologique l’homosexualité chez les animaux n’a pas de sens car encore une fois elle ne permet pas la reproduction. « Voilà bien un autre problème qui perturbe définitivement le néodarwinisme, car en l’absence de succès reproducteur, l’homosexualité pourrait remettre entièrement en question les fondements même de la sélection darwinienne. L’homosexualité a longtemps été considérée comme un tabou en biologie évolutive, ou du moins, les évènements homosexuels ont été regardés comme des anomalies sans intérêt. Pour de nombreux néodarwiniens, l’homosexualité n’est tout simplement pas possible. » Si on regarde le sexe chez les animaux comme un moyen de se reproduire uniquement, encore une fois on se heurte à pas mal de problèmes. Finalement leur sexualité est présente dans pas mal d’aspects de leur vie et est sûrement bien plus complexe que ce que l’on pourrait imaginer. Théorie de la hiérarchie-coopération L’homosexualité aurait la fonction de maintenir la cohésion et la coopération au sein d’un groupe. Chez les mâles elle permettrait des alliances pour élargir leur territoire, se protéger contre d’autres mâles, établir la hiérarchie. Chez les femelles l’homosexualité pourrait avoir un rôle dans la reproduction car il a été observé chez certaines espèces d’oiseaux l’établissement de couples entre femelles qui s’entraident pour assurer les soins de leurs petits. Chez les macaques japonais souvent des femelles arrivent à grimper les échelons en établissant une relation sexuelle avec une femelle plus dominante. Cependant on ne sait pas si ces unions sont créées expressément dans ce but ou si c’est parce que l’union existe déjà qu’elle entraine une élévation sociale. Hypothèse de l’entrainement Cette hypothèse évoque les possibles jeux sexuels chez les jeunes animaux, qui peuvent donc aussi être d’ordre homosexuel, et qui serviraient comme tout jeu, à s’entrainer pour la vie adulte. Hypothèse de l’agression des dominés Chez les éléphants de mer les jeunes mâles qui n’arrivent pas à accéder aux femelles à cause du mâle dominant peuvent se rabattre sur des petits pour évacuer leur frustration. L’issue est souvent fatale pour ces derniers. Alors où est l’intérêt reproducteur dans cette pratique ? Ces incidents n’arriveraient-ils que chez les espèces où les mâles présentent un taux très élevé de testostérone, comme les éléphants de mer ou les taureaux ? Chez le ver parasite Moniliformis dubius ou chez la punaise des lits les mâles « violent » d’autres mâles pour les empêcher de se reproduire. Le ver en éjaculant dans son adversaire lui bouche le canal l’empêchant de pouvoir éjaculer à son tour. La punaise elle, en remplissant le canal de son concurrent avec son propre sperme fécondera à travers lui la prochaine femelle avec qui il copulera. Le monde des invertébrés est tout à la fois fascinant et terrifiant. En résumé on va devoir se creuser la tête encore longtemps pour commencer à comprendre toutes les facettes de ce sujet complexe. Y arrivera-t-on un jour ! Je trouve personnellement que c’est une erreur de parler des animaux en général, chaque espèce est différente et il n’est peut-être pas pertinent de chercher et trouver des règles générales qui s’appliqueraient au règne animal entier ou même a une classe ou une famille en particulier. Mais ceci n’est que mon humble avis. J’espère que cette immersion dans les méandres de la sexualité animale vous aura plu. J’ai essayé, tout en abordant le plus de thèmes possibles, de simplifier au maximum et de suivre un fil conducteur logique pour ne pas vous perdre et j’espère avoir réussi sinon vous auriez déjà abandonné avant de lire ces mots. A bientôt ! :)
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AuteurNour Babaali Archives
Août 2022
Categories
Tout
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